Saint-Mihiel est riche des mémoires de son histoire longue et mouvementée. La plus ancienne mémoire est celle formée par l’ensemble des Roches, qui date d’il y a 160 millions d’années, quand la mer recouvrait la Lorraine actuelle. Il s’agit d’un massif calcaire à l’origine ; c’est la Meuse, le deuxième fleuve le plus ancien au monde, qui est responsable de la forme qu’elles ont aujourd’hui.

Au paléolithique ancien, nos ancêtres trouvent refuge sous les Roches et font de l’extraction de silex de qualité sur le plateau des Avrils (on se souvient du retard causé par leurs mines au chantier du Cosec).

Plus récemment, au début du Moyen-Age, ce sont les moines bénédictins autour du célèbre abbé Smaragde qui décident de transférer leur abbaye des hauteurs du Chatillon vers l’embouchure de la Marsoupe dans la Meuse. C’est la naissance de Saint-Mihiel.

Pendant les mille années qui suivent, la ville grandit, gagne en importance en tant que capitale du Barrois non-mouvant et siège de la Cour des Grands Jours. Les Ducs de Bar y ont leur château, les bourgeois fortunés construisent de belles demeures.

Il y a aussi des pages noires dans ce livre d’histoire. L’une des plus noires, voire la plus noire de toutes, est celle qui traite de la première guerre mondiale. Quatre années d’occupation, de privations, d’angoisse et de destructions. Les traces en sont encore visibles aujourd’hui, notamment dans les forêts autour de Saint-Mihiel. Mais aussi en ville : des impacts de balles sur les piliers de l’église Saint-Michel, des livres mitraillés dans la Bibliothèque Bénédictine, l’anéantissement par obus de la célèbre Table du Diable… sans oublier des milliers de vies détruites à jamais. Celles des soldats morts dans l’enfer du Bois d’Ailly, la partie du front de l’Ouest qui tient le triste record du nombre de tués par km². Mais aussi celles des enfants de l’époque, à qui la guerre a volé leur jeunesse, les Sammiellois que l’on a dépouillé de tous leurs biens, de toute leur épargne pour financer l’effort de guerre ennemi. Puis les grands blessés, mutilés pour le restant de leur vie, et ceux qui ont perdu leur esprit par le stress et le vacarme des bombardements incessants.

Il y a cent ans, les survivants sont convaincus que cette guerre qui vient de se terminer était la « der des ders ». Plus jamais ça. Nous avons vu ce que cela a donné. Nous voyons aussi la résurgence de certaines idéologies qui ont mené à la deuxième guerre mondiale.

L’homme a la mémoire courte. Pour cette raison, nous soulignons l’extrême importance des cérémonies mémorielles, du souvenir. Il est impératif de rappeler aux jeunes et moins jeunes d’aujourd’hui qu’une guerre n’est jamais glorieuse. Elle est meurtrière, sale et traitresse.

La première guerre mondiale fait partie de notre histoire, de ce que nous sommes aujourd’hui. C’est pour cette raison que nous œuvrons pour le classement des sites du Saillant. Pour que la mémoire perdure.